Deux Bretons se sont imposés lors d'une journée de finale placée sous le signe du badminton de haut niveau et de la preuve une fois encore que la Bretagne est une belle terre de badminton. Avec, aussi, une surprise et la victoire d'une belle paire de double : William Villeger et Julien Maio.
Il y avait la queue, ce dimanche matin brumeux à quelques kilomètres de Rennes, devant la Glaz Arena. Une longue queue - comme on en a sans doute rarement vu pour des finales de championnats de France. Et à 11h, lorsqu' Antoine Fauvet a prononcé le rituel "Zéro égalité, jouez!", la salle était presque pleine. Les sympathiques bénévoles de l'organisation avaient oeuvré une partie de la veille au soir pour donner à l'écrin fédéral un peu plus de lumière encore, réinstallant un seul terrain au lieu des deux précédemment utilisés.
Double mixte - Thom et Delphine bousculés le temps d'un premier set
Premier match, donc, pour ces finales. Avec, de part et d'autres, deux membres d'une même famille - Delphine à gauche, Fabien à droite. Tous deux d'origine d'Ezanville Ecouen, leur club de toujours, et depuis quelques temps jouant sous la bannière de Chambly. Cette fois-ci, ils jouaient donc l'un contre l'autre, pour la première fois en finale d'un championnat de France. Le premier set a tenu toutes ses promesses, avec une Vimala Heriau particulièrement inspirée au filet, malgré le talent de son adversaire directe, Delphine Delrue, loin d'être maladroite mais un peu mise en difficulté sur certains échanges. Fabien Delrue, lui, rendait coup pour coup à Thom Gicquel en fond de court, et les deux duos restaient au coude à coude pendant tout le premier set. A 14 partout, un problème de tapis et un let annoncé donne lieu à une discussion courtoise certes, mais qui donnait bien le ton de cette rencontre - sur le terrain, pas quartier ! Cela dit, les sourires revenaient vite sur les visages, avec un quatuor qui prenait de toute évidence un malin plaisir à évoluer dans de telles conditions, avec un public engagé. c'est Vimala et Fabien qui prennent l'ascendant en fin de set à 18:17, mais Thom et Delphine recollent, et d'un bloc de revers en hauteur inspiré, Thom donne la victoire 21-18 aux champions en titre. Le deuxième set passera plus vite - les numéros 5 mondiaux ayant pris les rennes du match plus clairement - Fabien Delrue, lui, doit faire une pause à 6-14 pour ses problèmes de hanche, mais l'intervention des médecins n'y feront pas grand chose - Thom Et Delphine étaient favoris et s'imposent 21-10 sur un dernier smash de Thom. Des accolades émouvantes - entre Vimala et Fabien pour leur dernier match ensemble, entre Vimala et Delphine, partenaires de double qui allaient se retrouver quelques heures plus tard sur la finale du double dame. Entre Fabien et Delphine, aussi, bien sûr, pour un calin entre frère et soeur bien mérité. C'est un cinquième titre pour le duo phare de l'équipe de France, dont l'hégémonie depuis 2018 n'avait été remise en cause qu'en 2021 lors de l'édition particulière en temps de Covid, où Ronan Labar et Rosy Pancasari avaient été couronnés.
"C'est un petit rêve qui se réalise, de gagner un championnat de France devant ma famille et mes amis, ici en Bretagne. C'était un match compliqué, on était tous les deux tendus avec Delphine, elle qui jouait face à son frère, moi devant mon public, et puis ils n'avaient rien à perdre et tout a gagner, c'est pour cela qu'on a eu du mal au premier set." analysait Thom. "C'est vrai que ce n'était pas facile de jouer contre eux - je sais que c'est la dernière fois qu'ils jouent ensemble, je sais aussi que mon frère a ses problèmes de hanche et forcément, dans ces cas là, on a pas envie de jouer sur les faiblesses de son frère pour gagner" rappelait quant à elle Delphine Delrue. "Pour nous, gagner 5 fois ce titre - Besançon a du mal à passer car nous n'avions pas pu défendre notre titre donc c 'est un peu comme si c'était cinq d'affilée, cela fait chaud au coeur. On sent beaucoup d'engouement derrière nous, ici, aux IFB, et bien sûr, ca sera encore plus chaud aux Jeux, mais c'est très positif pour nous"
Julien Maio et Wiliam Villeger : "on compte aussi"
Au mixte succédait le double hommes, avec une demi première surprise et le gain de la première manche pour Julien Maio et William Villeger, très vite dans le match et prenant très tôt l'initiative dans l'échange. La precision et la vitesse de Julien au filet, agrémentées des coups de boutoirs lancés tous azimuth par William Villeger en grande forme derrière placait le duo sur orbite avec le gain du set 21-14. Le deuxième set partait sur des bases similaires, malgré la rebellion des frangins Popov. Mais quelques fautes frustrantes, comme ce gros smash mi court de Tomi dans le filet laisse planer le doute sur la capacité des 32ème mondiaux à garder le titre glané à Boulazac en 2022. Le point du match à 9/4 dans le deuxième set provoque des applaudissements nourris du public - y compris lors des ralentis diffusés sur les magnifiques écrans géants : William Villager défend par deux fois alors qu'il est quasi allongé sur le court. Quelques points après, sur un superbe amorti déguisé de Christo Popov c'est Julien Maio qui plonge de tout son long. "C'était important pour nous de ne rien lâcher, de ne pas les laisser gagner des points trop facilement - mentalement, c'est essentiel" explique Julien Maio. Le match gagne en intensité et en qualité, mais William et Julien ne lâchent rien et s'offrent un premier volant de match que William smash dans la bande. Le deuxième est le bon, avec un retour de Julien qui laisse impassible leurs adversaires. Le Strasbourgeois célèbre son quatrième titre de champion de France après les trois glanés en 2017, 2018 et 2019 et un premier pour William Villeger. "On a fait un match solide, il faut aller chercher les Popov, ils jouent bien, ont l'habitude de jouer des grosses paires, et nous avons été sérieux sur ce match. C'était aussi pour nous l'occasion de montrer à la Fédé qu'il y a une troisième paire qui compte, même si on a pas été choisis pour aller aux championnats d'Europe, on montre qu'on est là, en battant au passage Ronan et Lucas en demi, et les Popov en finale" explique Julien au sortir du match, qui trouvait par ailleurs difficilement les mots pour évoquer son état d'esprit vis à vis de sa compagne et partenaire Léa Palermo victime d'une blessure grave il y a quelques jours. "Cette victoire, évidemment, c'est pour elle. Elle vit quelque chose de très difficile et moi aussi, et cela m'a fait tellement plaisir qu'elle soit là hier, sur la chaise " Une dédicace pleine d'émotions, émotion tout juste contenue également pour le grand gaillard qui posait à ses côtés : "Je suis particulièrement heureux de ce titre, car j'ai perdu mes deux partenaires en cours de saison, et c'est vrai que cette victoire fait du bien" explique William Villager. Les deux partenaires, qui ne jouent ensemble que depuis 5 mois, affichent leurs ambitions - il le peuvent avec la qualité de jeu démontrée aujourd'hui. "on va essayer de monter au classement, pour aller jouer des tournois plus importants, avec Paris 2024 dans un coin de notre tête" explique Julien. En tous cas, le message lancé aux instances décisionnelles est clairement passé - ces deux là seront un beau pari pour la suite également.
Xuefei fait le show
Plus déterminée que jamais, la joueuse de Rostrenen n'a laissé que les miettes à Rosy Pancasari, la Strasbourgeoise. Arborant les couleurs de Solibad en ayant lacé l'une de ses chaussures des lacets solidaires, "Fei Fei" a dominé les échanges dans tous les compartiments du jeu. plus incisive, plus rapide à prendre l'attaque, la numéro un tricolore n'a pas laissé de place au suspense, avec, en plus, un public tout acquis à sa cause. Une démonstration, avec tous les coups du bad assenés les uns à la suite des autres, et des points qui défilent au grand désespoir de Julien Fuchs, l'entraineur de Rosy sur la chaise. Du coté d'Arthur Siberil "Monsieur Feifei", l'humeur est forcément plus à la détente. 21-6, 21-7. Le score est sans appel avec un point de match à l'image de la rencontre - un amorti déguisé qui laisse Rosy sans voix ete sans réaction, et qui rappelle les heures de gloire d'une certaine Pi Hongyan, qui mettait des roustes en finale des premiers championnats de France où elle participait. Dans un autre registre, Feifei continue de marquer son empreinte en démontrant aussi son regain de forme tant espéré après de nombreux soucis de santé. Bravo à elle et à sa terre d'adoption, qui signe ici une deuxième victoire. Bravo aussi à Rosy, qui fait un parcours magnifique dans cette édition 2023 malgré une finale compliquée.
"Je n'aurais jamais imaginé cela en arrivant en France il y a quelques années, de devenir triple championne de France. Je remercie vraiment le public pour son soutien ici" souriait-elle au micro de Sport en France
Youtube et Sport en France ce week-end
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